Parmi les clichés concernant les familles roms, l’un des plus tenaces est leur supposé refus de scolariser leurs enfants. Jane Bouvier, en créant en 2013 l’association «L’école au présent », a souhaité apporter un démenti à ces idées reçues. Depuis trois ans, elle parcourt tous les bidonvilles de Marseille et inscrit les enfants dans les différentes écoles de la ville. Dans la plupart des cas, non seulement les parents ne s’y opposent pas mais ceux sont les enfants eux mêmes qui expriment avec force leur désir d’emprunter le chemin de l’école, comme les autres
Retour sur le parcours de deux enfants :
Fin 2012, Soledad née en 2003 et David né en 2002 vivent au 91 bd Plombières, dans une caserne réquisitionnée par un collectif d’associations et de militants. Ils sont scolarisés pour la première fois : Soledad à l’école Edouard Vaillant et David à l’école du Parc Bellevue.
Soledad et David vivent avec leurs parents, elle est l’aînée d’une fratrie de 5 enfants, lui d’une fratrie de 3 enfants.
Fin Juillet 2013, a lieu l’expulsion du 91 bd Plombières. La famille de Soledad rentre en Roumanie, les enfants sont déscolarisés pendant 9 mois. La famille de David, après plusieurs semaines d’errance, se retrouve sur un terrain au 124 bd Plombières. En septembre David et ses frères et sœurs peuvent poursuivre leur scolarité dans la même école.
La famille de Soledad revient en France en mai 2014 et Soledad demande à Jane Bouvier de lui trouver une place à l’école. La famille s’installe, elle aussi, dans une petite tente au 124 bd Plombières dans le dénuement le plus total. La directrice de l’école du Parc Bellevue accepte d’accueillir la fratrie.
Juillet 2014, nouvelle expulsion. Les familles quittent le 124 bd Plombières. La famille de David est accueillie à l’ESH (espace solidaire d’hébergement) géré par l’AMPIL, la famille de Soledad se retrouve à la rue. Ils dorment dehors, sont harcelés par la police tous les jours, plusieurs fois par jour mais dès la rentrée des classes, Soledad reprend le chemin de l’école.
Fin septembre 2014, la famille s’installe dans un squat au Boulevard National à deux pas de l’école. Soledad se lève seule tous les jours pour aller à l’école et n’est jamais absente. Elle participe à tous les évènements, les sorties, même au soutien après la classe.
Le père de David est arrêté et incarcéré pour un vol de ferraille, la maman désespérée, prend rendez vous avec la directrice de l’école pour lui expliquer la situation et lui demander si David peut manquer un jour par semaine pour travailler avec elle. L’école décide d’aider la famille (restos du cœur etc.) et refuse que David travaille avec sa maman pendant le temps de classe.
L’équipe enseignante est très attachée à ces deux élèves et admirative de leur courage et leur assiduité.
Jeudi 18 juin 2015, David et Soledad reçoivent le prix d’honneur délivré par la Ville de Marseille et la Caisse des écoles (lors d’une cérémonie au Dôme), aux élèves de CM2 les plus méritants.
David et Soleda, Roms et élèves méritants de Marseille : Article de Delphine Tanguy dans La Provence