Un génocide peut en cacher un autre

 

Un génocide peut en cacher un autre.

 
Lors d’une récente réunion à Marseille, à l’initiative de l’association « Notre route », des élus locaux se sont intéressés à l’histoire du peuple Rom Tsigane et « demandent à la France la reconnaissance du génocide tsigane ». Il convient de saluer une telle initiative qui, bien que tardive, rejoint les attentes déjà anciennes des nombreuses associations représentatives des Roms Tsiganes mais aussi de tous ceux qui les soutiennent et qui s’efforcent de mettre en lumière le drame qu’ils ont subi durant la dernière guerre mondiale en Europe mais aussi en France.
 
En 2010, à l’initiative de la FNASAT, de très nombreuses manifestations ont tenté de remettre en lumière les tentatives d’extermination de ce peuple. Pour notre part, nous ne cessons de rappeler ces dramatiques événements afin qu’ils servent de leçon pour l’avenir. Avec d’autres, comme l’association SAMUDARIPEN ou encore La fondation du Camp des Milles, nous ne cessons de répéter : DOSTA plus jamais ça ! Nous avons réagi au discours du président de la République en juillet 2010 en rappelant les faits historiques et les rafles des tsiganes par l’État français en 1939/40. En juin dernier, nous avons reçu et écouté avec une grande émotion les propos de Raymond GURÊME qui, à 84 ans, a le courage de raconter ces moments douloureux de son histoire ; nous participons aux commémorations du camp de Saliers à Arles et le festival annuel LATCHO DIVANO est l’occasion de faire un retour sur cette histoire tragique.
 
Nous avons donc toutes les raisons de soutenir l’initiative des élus et tout particulièrement Frédéric DUTOIT. Cependant il nous semble qu’une telle démarche ne prendra son sens que si elle se situe en relation avec la réalité d’aujourd’hui. Nous ne pouvons hélas que constater que, 70 ans plus tard, les conditions sont réunies pour que les Roms Tsiganes servent à nouveau de boucs émissaires et fassent ainsi l’objet d’une nouvelle forme de génocide, certes plus soft mais tout aussi réel. On retiendra notamment les propos d’Arno Klarsfield président de l’Office Français d’Immigration : « Les Roms qui sont renvoyés, disons en Roumanie, vont vers un pays où ils sont moins heureux qu’en France, mais c’est pas pour autant qu’ils peuvent rester en France »…. alors les préfets ne font pas ce travail de renvoyer , non pas vers la mort, non pas vers Auschwitz ou vers une situation… Quant à Michel BOURGAT adjoint au maire de Marseille, il a nié lors de la réunion citée, toute relation entre cette histoire et la réalité à laquelle sont confrontés aujourd’hui à Marseille et ailleurs les Roms Tsiganes qu’ils soient français ou étrangers.
 
Nous ne cessons pourtant de dénoncer les rafles permanentes des familles Roms chassées de leur pays par la haine et le racisme. Nous condamnons, de même, le déni permanent des institutions et des élus de Marseille qui refusent de reconnaître à des familles habitant dans cette ville depuis des dizaines d’années, le droit à un habitat correspondant à leur culture et leur mode de vie. Oui, Monsieur l’Adjoint, quitte à vous contredire et vous choquer, nous affirmons que l’histoire, hélas, se renouvelle à Marseille, comme ailleurs, et que les conditions sont réunies pour que le peuple Rom Tsigane fasse à nouveau l’objet d’un génocide culturel peut-être moins sanglant mais tout aussi efficace. La recherche de boucs émissaires est certes un argument politique efficace pour expliquer l’échec d’une politique de solidarité. En aucun cas il ne peut servir à rejeter tout un peuple porteur d’une culture plus que millénaire.
 
Alain FOUREST
Marseille le 22 novembre 2011
 
 
 

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