La note ci dessous résume la participation de rencontres Tsiganes à ce débat :
Les conditions d’habitat des « familles Roms/Tsiganes » dans la Communauté urbaine Marseille Métropole
I Question de vocabulaire
Roms, Manouches, Gitans, Tsiganes, Gens du Voyage… Et aussi Nomades, Romanichels… De qui parle-t-on ? Quels termes utiliser ?
La variété des appellations est le reflet de la diversité des populations concernées, ainsi que des représentations dont elles font l’objet dans les sociétés au sein desquelles elles vivent, selon les historiens, depuis plus de 600 ans.
Les institutions, nationales ou européennes, invoquant des raisons administratives, politiques, idéologiques, présument que des groupes sociaux et des communautés, au demeurant très diverses peuvent avoir des comportements identiques et/ou être confrontés aux mêmes difficultés, en raison de leur appartenance à une même entité générique (les Roms/les Tsiganes)
A Marseille le terme ‘gitans’ est le plus souvent employé pour les caractériser car cette ‘communauté’ est largement représentée dans l’ensemble de l’agglomération Marseillaise. On notera cependant des distinctions notables entre les gitans d’origine andalouse ou d’origine catalane ou encore ceux qui ont été rapatriés d’Algérie au moment de l’indépendance. Il faut également prendre en considération d’autres groupes familiaux reconnus comme Manouches, ou encore Sinti et Yéniches que l’on retrouve dans certains quartiers et qui ont des origines voisines. Une telle diversité pourrait apparaître purement anecdotique si l’on considère que toutes ces personnes sont d’abord des citoyens français souvent depuis plusieurs générations et aussi citoyens marseillais. A ce titre ils bénéficient des mêmes droits attachés à tout citoyen et en particulier le droit au logement reconnu par le législateur. On peut ajouter qu’ils ont également, à ce titre, à se soumettre aux mêmes règles de la vie en commun.
A la diversité des origines s’ajoute la diversité des choix d’habitat des uns et des autres. On retient en général trois catégories :
– Les ‘’gens du voyage’’ ou encore voyageurs sont supposés habiter dans une caravane et circuler à travers le pays. Détenteurs d’un carnet de circulation, ils devraient stationner sur des terrains d’accueil prévus à cet effet.
– Les sédentaires qui habitent dans des logements traditionnels publics ou privés.
– Les semi-sédentaires qui, ayant renoncé au voyage, séjournent en permanence dans un habitat mobile ou léger et le plus souvent précaire, en bordure des agglomérations.
Ces catégories donnent cependant une vision trop simpliste de la réalité. Même si la sédentarisation contrainte ou choisie est une tendance lourde, pour de multiples raisons, beaucoup de groupes familiaux n’ont pas totalement renoncé à des formes d’habitat plus légers proches de la nature et permettant une vie collective faite de solidarité mais aussi parfois de conflits. La manière dont ils sont perçus et catégorisés par la population et par les institutions renforce fréquemment cette différenciation.
Faute trop souvent de prendre en compte cette complexité, les pouvoirs publics, s’appuyant sur le principe républicain d’égalité des citoyens, sont confrontés à des situations conflictuelles et à une incompréhension de la population locale. En effet, l’insuffisance ou l’absence de solution d’habitat adapté répondant à ces besoins conduits à la multiplication de situations d’habitat précaire, insalubre et parfois illégale qui confortent l’image négative traditionnellement attachée à cette communauté.
L’état des lieux dans l’agglomération Marseillaise
Rappelons au préalable qu’à ce jour, aucune commune de la communauté urbaine ne s’est conformée à la loi du 5 juillet 2000 qui prévoit l’ouverture d’aires d’accueil pour les voyageurs.
En ce qui concerne les sédentaires, depuis de nombreuses années, diverses études ont montré l’importance et la diversité de la présence de ces familles dans Marseille et les problèmes de cohabitation dont certaines d’ entre elles sont à l’origine.
Les municipalités successives ont, chacune à leur manière, tenté d’y remédier sans réel succès. Les différents documents en annexe de ce dossier résument l’évolution des dix dernières années. Un rapport diagnostic réalisé par notre association en 2008 avec l’appui de la Fondation Abbé Pierre a tenté d’alerter les pouvoirs publics sur une situation qui ne cesse de s’aggraver. Ce document mériterait une mise à jour en y intégrant la situation dans les communes membres de Marseille Métropole et en particulier celles de l’Ouest : Saint Victoret, Gignac, Marignane, Châteauneuf-les Martigues…
Dans le contexte général de pénurie de logements sociaux, il peut apparaître peu réaliste de tenter de prendre en compte les besoins particuliers d’habitat d’une population estimée seulement à quelques milliers et qui nécessitent à la fois un travail de programmation pointu, des moyens administratifs et financiers, pour partie, spécifiques et un suivi dans la gestion quotidienne. Cependant la dégradation régulière des conditions d’habitat de ces familles, au-delà des conséquences sur leur vie quotidienne, renforce la stigmatisation dont elles sont l’objet vis-à-vis du reste de la population et les enferme dans une marginalisation économique et sociale croissante.
Compte tenu du diagnostic qui précède il semble indispensable que les responsables de Marseille Métropole prennent en considération cette partie de la population et mettent en place des outils pertinents d’analyse et un programme d’intervention particulier auquel nous sommes prêt à apporter notre concours.
Pour notre part comme on le verra dans les notes ci jointes nous avons, sans succès depuis plus de 10 ans signalés les principaux lieux qu’on peut classer dans la procédure « d’habitat indigne » et nous avons suggéré des pistes d’action.
En novembre 2008 nous avons pris part à la mise à jour du Plan Départemental d’Action pour le Logement des Personnes Défavorisées (PALPD) et nous avons transmis un document de synthèse et de propositions aux services de la préfecture et du conseil général.
Des propositions opérationnelles
1° Mise à jour des connaissances : A partir des données existantes, il convient de compléter les informations existantes par une enquête exhaustive puis de déterminer les priorités et les modalités d’intervention.
2° Constitution d’une équipe d’intervention territoriale qui, en contact avec les populations concernées, définira les urgences et les programmes.
3° Mise en place d’actions pluriannuelles qui comporteront des programmes de construction d’habitat adapté, de requalification de l’habitat existant, de gestion et d’accompagnement social (éducation santé, accès à l’emploi etc …) et de création de terrains familiaux. Ces différents programmes d’intervention ne nécessitent aucune démarche particulière ; les procédures et les lignes budgétaires existent. On peut de plus avoir recours aux financements européens en faveur de la population Rom et qui à ce jour sont largement inutilisés faute de demande.
4° Mis en place de programmes de formation ouverts aux personnels de services publics et des organismes de logements sociaux afin de les familiariser avec la culture tsigane.
5° Développement de programme d’information et de sensibilisation du public et en priorité des jeunes afin de réduire les effets des préjugés négatifs sources d’incompréhensions et de conflits.
Marseille le 3/09/2011
Annexes disponibles à consulter : cdr.rencontrestsiganes@gmail.com
Etude DDE 13 novembre 1998
Les cités d’urgence à Marseille : Juillet 2001
L’habitat des Gitans sédentarisés novembre 2008
Cité de Gitans : rapport pour la fondation Abbé Pierre 2008
L’habitat tsigane et le PDALPD
Accès à l’habitat des tsiganes , voyageurs ou sédentaires, bilan d’étape juillet 2011