LES GITANS D’ANDALOUSIE : mythe ou réalité ?
L’Andalousie, Grenade, Séville, Cadix : qui d’entre nous n’a pas un jour été séduit par ce monde de fête de musique et de danse largement exporté dans le monde entier depuis des siècles et toujours renouvelé. Il est en effet difficile de rester insensible à cette expression d’un peuple qui sait traduire avec éclat l’essentiel de la tragédie humaine : l’ amour, la mort, la liberté. Tout visiteur de l’Andalousie passant par Grenade sera conduit à gravir le « Sacromonte » lieu emblématique du flamenco. Il risque d’être un peu déçu de ces quelques instants de spectacle programmé pour les touristes du monde entier et qui n’a plus qu’un lointain rapport avec le véritable flamenco.
S’il élargit son regard, il pourra apercevoir l’envers du décors. Loin de la richesse opulente de la ville, des enfants jouent et vivent au milieu des déchets de toutes sortent et dans des abris de fortune. Le bidonville côtoie quelques belles demeures nées d’une spéculation immobilière envahissante. Le Sacrormonte se meurt de son succès. Derrière la façade, au -delà du folklore, la réalité du peuple gitan transparaît avec sa misère et dimension tragique.
On aurait tort de penser pour autant qu’il s’agit de la fin d’une histoire et d’une culture millénaire. Il suffit de sortir des circuits touristiques trop mercantiles pour découvrir la richesse et la diversité du flamenco et de ceux qui le pratiquent, qu’ils soient gitans ou « payo »
Pour autant, l’idée largement répandu selon laquelle, en Espagne, les gitans, grâce à leurs musiques et leurs danses, auraient trouvé leur place dans la société, est largement erronée. Ici comme dans le reste de l’Europe, malgré plusieurs siècles de présence, le peuple gitan reste marginalisé sinon rejeté. Loin des clichés pour touriste et amateur de sensation forte, Ils sont, pour la plupart, regroupés dans des quartiers pauvres en marge des villes. Comme de nombreux immigrés d’Amérique du Sud et d’Afrique, ils font partie de ce prolétariat moderne qui traite et ramasse les fruits et les légumes et en particulier les olives que nous consommons en Europe au moindre coût.
On nous dit que l’Espagne contrairement à d’autres pays a réussi l’intégration des Gitans. : « Gitans d’Espagne, un peuple aujourd’hui respecté : Oui, parlons des gitans d’Espagne, le seul peuple tsigane qui fait partie intégrante de l’âme historique, artistique et morale de leur pays qui les a adoptés autant qu’ils l’ont eux-mêmes adopté. » Antoine Blanca
A voir ! présente depuis le XVème siècle en Espagne et sédentarisée de force, la communauté tsigane (gitane) qui compte aujourd’hui environ 800.000 personnes, n’a jamais su trouver sa place. Elle reste la minorité la plus mal vue d’Espagne
Tout au long des siècles de l’histoire de l’Espagne, Ils n’ont pas manqué d’être pourchassés, étiquetés, parqués. A l’entrée de la ville de Barcelone, au XVIIIe siècle, un panneau indiquait: "entrée interdite aux gitans, aux murciens [habitants de Murcie et de sa région], et autres gens de mauvaise vie". Un exemple entre mille.
Alors certes, ne boudons pas notre plaisir à prendre part à la fête à laquelle nous invitent Gitans, Tsiganes ou Roms, mais restons lucides devant les clichés qui les réduiraient à des groupes folkloriques à la mode pour oublier le racisme dont ils sont l’objet depuis des siècles.
« Le gitan est ce qu’il y a de plus élevé, de plus aristocratique dans mon pays, celui qui garde la braise, le sang et l’alphabet de la vérité andalouse et universelle » F. Garcia Lorca
Alain FOUREST Marseille le 18/06/2011