« La condition d’étranger se définit moins par le passeport que le statut précaire »

« La condition d’étranger se définit moins par le passeport que le statut précaire »

 
Les graves affrontements récents en Hongrie entre la « Garde Hongroise », milice d’extrême droite, et la communauté Rom Tsigane sont un signe de plus de la montée en puissance, partout en Europe, d’une idéologie raciste et xénophobe qui l’on croyait enfin marginalisée.
 
Dans un récent article, le philosophe Etienne BALIBAR écrit : « Au cours de l’histoire européenne pluriséculaire, les Roms ou les Tsiganes ont formé une sorte de communauté à distance, transfrontalières. Avec les Juifs, c’est l’une des grandes minorités discriminées dans toute l’Europe. Les nouvelles persécutions à l’encontre des Roms, qui ont marqué la politique française en 2010, me semble être devoir replacées dans l’ensemble européen… Les passions xénophobes montent partout à la faveur des nationalismes exacerbés, eux-mêmes symptômes de la crise économique et morale que traverse l’Union Européenne en ce moment. Les ingrédients étaient les mêmes dans les années trente, même si tout n’est pas comparable. Et nous, Français, ne devons pas nous croire immunisés par notre esprit ou nos traditions républicaines ».
 
Sans aller chercher de sombres exemples dans d’autres pays c’est quotidiennement qu’ici en France et dans la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, nous sommes les témoins trop souvent impuissants de cette aggravation de la xénophobie et de la stigmatisation envers les Roms Tsiganes ou encore ceux que l’on nomme hypocritement Gens du Voyage. Même si responsables politiques et les médias ont apparemment trouvé d’autres sujets pour inquiéter les citoyens, les conséquences du discours de Grenoble ont largement été prises en compte par les services et renouvelées par les propos de fermeté du nouveau Ministre de l’Intérieur Claude Guéhant.
 
La guerre contre les « campements illégaux » de Roms Tsiganes se poursuit activement sur le terrain. Elles visent les Roms étrangers, qu’ils soient ou non en situation régulière du point de vue des lois européennes. A Marseille, ou Aix-en Provence le harcèlement policier, les menaces quotidiennes et les démolitions des bidonvilles se poursuivent avec l’assentiment tacite d’une large partie des élus et de l’opinion sous le regard de la presse. Cette guerre déclarée concerne aussi, bien que plus discrètement, les tsiganes français sédentarisés. Chaque semaine, à la demande des services de l’Etat et avec la complicité active des élus locaux, des familles sont poursuivies et parfois condamnées à de lourdes peines pour avoir simplement stationné quelques caravanes sur le terrain dont elles sont propriétaires.
 
Il arrive parfois qu’un juge mette un frein à cette volonté de rejet systématique au mépris des principes et des lois de la République et l’on s’en réjouit. Mais nous savons aussi combien de démarches et d’efforts de conviction sont nécessaires pour tenter tout simplement de faire appliquer le droit.
 
Rappelons avec Etienne BALIBAR que L’histoire nous a enseigné qu’il ne faut pas sous-estimer la puissance meurtrière des sentiments xénophobes de masse.
Alain FOUREST Marseille le 8/05/2011
 
 

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