{{ {{{LA PEUR DE L’AUTRE}}} }}
Depuis quelques semaines, dans le département du VAR, des incidents parfois violents opposent des groupes importants de voyageurs aux maires de plusieurs communes qui, tout en étant pas en règle avec la loi de juillet 2000 s’oppose par tout moyen au stationnement de ces groupes. Cette situation n’est hélas pas nouvelle et pas propre au département du VAR comme le démontre la revue de presse diffusée régulièrement par la FNASAT. Par contre les propos des élus varois et d’une partie de la population doivent nous inquiéter davantage. Quels que soient les arguments de droits avancés, les tsiganes, qu’ils soient voyageurs ou sédentaires, sont systématiquement présentés comme des fauteurs de troubles qui ne respectent pas les lois de ce pays et encore moins la sacro-sainte propriété d’autrui. Ils sont ainsi considérés comme indésirables dans le département et traités comme tels. On ne s’étonnera pas alors que certains groupes de voyageurs, exaspérés par un tel rejet, manifestent en force pour faire valoir leurs droits. L’engrenage de l’incompréhension et de la violence est alors en route et la peur de l’autre trouve un terrain propice aux excès de langage et de comportement.
Jusqu’à ce jour, les représentants de l’Etat dans le département n’ont pas su ou pas voulu faire entendre la voix de la raison et du dialogue et encore moins du respect de la loi républicaine.
Cette impasse lourde de menace ne saurait se circonscrire au Var, voir même à la France et nous ne pouvons que constater une stigmatisation croissante des communautés tsiganes à travers l’Europe et les peurs qu’elles engendrent dans la population. Le proverbe nous dit que la peur est mauvaise conseillère. Elle trop souvent la conséquence d’une ignorance sur la réalité de la vie de ces familles, leur histoire, les valeurs et les traditions qu’elles préservent malgré les multiples obstacles.
Certes beaucoup d’entre elles se refusent de voir disparaître un mode de vie ancestral et résistent à leur manière aux mesures d’assimilation qui leur sont opposées par les institutions. La question qui nous est alors posée peut se résumer ainsi : peux-t-on être à la fois citoyen français et revendiquer une identité culturelle différente de la majorité ? A ce jour on admettra que la réponse institutionnelle est majoritairement négative et que les divers discours qui se développent sur l’identité française ne laissent pas espérer une évolution positive. Le combat des écologistes et des chercheurs pour préserver la diversité des espèces doit-elle si limiter au monde animal et végétal ? Ce serait dérisoire ! La recherche d’uniformité dans le comportement et les modes de nos concitoyens est, à n’en pas douter, une source d’appauvrissement collectif et peut être un signe du déclin d’une civilisation.
Apprendre à connaître l’autre avec ses différences en acceptant de remettre en cause des préjugés, négocier dans le respect des partenaires des accords à même de faciliter la cohabitation et des règles de vie acceptables par tous, ce sont là des perspectives indispensables et urgentes à mettre en place si l’on veut éviter de revivre les dramatiques évènements du siècle dernier et préparer un avenir plus souriant.
Ne nous y trompons pas l’enjeu ce n’est pas l’avenir du peuple Tsigane et de sa diversité culturelle : Voilà bientôt mille ans qu’à travers le monde, ils ont su résister à toutes les oppressions. L’enjeu c’est la capacité de nos sociétés à admettre qu’une petite minorité d’hommes et de femmes puissent vivre au milieu de nous en bonne intelligence sans disparaître en abandonnant ce qui les unit depuis des siècles.
Marseille le 23 juin 2009 Alain FOUREST