Voilà de nombreuses années qu’avec d’autres associations nous nous efforçons de faire reconnaître le droit au logement et à un habitat décent pour les tsiganes qu’ils soient voyageurs ou sédentaires. la mise en application de la loi DALO (Droit au logement opposable) et la révison des PDALPD ( Plan départmental d’action pour le logement des personnes défavorisées) sont une ocassion pour rappeler que les tsiganes peuvent comme les autres citoyens de ce pays revendiquer pour, ceux qui le souhaitent, à bénéficier de la loi DALO. Il faut les informer de ce nouveau droit et les inciter a remplir les dossiers auprès des travailleurs sociaux ou des permanences mises en place par la Fondation Abbé Pierre.
Dans les départements, il faut également faire valoir au Préfet et au Conseil Général la situation des sédentaires et l’expression de leurs besoins. Le document ci-dessous a été envoyé en ce sens à la préfecture des Bouches-du- Rhône .
{{ {{{L’HABITAT DES TSIGANES (GITANS, GENS DU VOYAGE)
Dans les Bouches-du-Rhône}}} }}
Dans le cadre de l’élaboration du prochain plan départemental d’action pour le logement des personnes défavorisées nous souhaitons porter à connaissance les informations dont nous disposons sur les conditions de logement et d’habitat des personnes généralement désignées sous le terme de « gitans » . On a coutume de rassembler sous cette dénomination des familles relevant d’une culture, de comportements et de mode de vie spécifiques et qui font l’objet le plus souvent de préjugés, voire de discrimination depuis de longues années et qui subissent, comme d’autres, les conséquences d’une crise du logement qui se généralise.
Sans qu’il soit possible de chiffrer de manière précise le nombre personnes qui, habitant dans le département, font partie de cette communauté, on estime de l’ordre de 8 à 10.000 ceux qui reconnaissent appartenir à l’un ou l’autre des groupes tsiganes parmi lesquels les gitans et les manouches sont les plus nombreux dans la région. Si une partie d’entre eux a, parfois depuis longues années, fait le choix d’une intégration dans la société urbaine et d’un mode d’habitat classique, une part croissante de ces familles se trouve affrontée à de multiples obstacles pour accéder à un habitat à même de répondre à leurs besoins.
Ces obstacles peuvent se regrouper selon trois chapitres :
-L’insuffisance ou la fragilité des ressources,
-Le refus d’un habitat social collectif qui ne correspond pas à leurs attentes,
-Les discriminations et le rejet dont ils sont le plus souvent l’objet en raison de leur origine et de leur comportement supposé.
Ces trois facteurs conjugués amènent une part croissante de ces familles à vivre dans des conditions d’habitat inadapté, insalubre, voire indigne. On peut regrouper ces diverses formes d’habitat en quatre catégories :
1° Le parc social classique.
-Les bailleurs sociaux ont accueilli dès l’origine une partie de ces familles regroupées dans un parc social qui se trouve aujourd’hui le plus médiocre sinon dégradé et souvent destiné à être démoli. C’est par exemple le cas, à Marseille, dans les cités du Petit Séminaire, des Cèdres, ou encore de Saint Paul. On trouve aussi ce type de regroupement à Salon, Aix-en-Provence mais aussi Martigues ou Marignane. Depuis de trop nombreuses années, dans ces cités, laissées à l’abandon, ces familles, souvent nombreuses et pauvres, vivent dans une forme d’exclusion qui s’apparente au ghetto. Les procédures d’expulsion en cas de dette de loyer se multiplient et leur relogement dans une perspective de démolition est toujours problématique.
Nous avions, lors d’une enquête réalisée en 2001, estimé que, sur l’ensemble du département, un millier de logements HLM occupés par ces familles devraient faire l’objet soit d’une réhabilitation lourde soit d’une démolition. Sept ans après, aucun programme en ce sens n’ayant été encore engagé, le nombre de familles en situation de mal logement dans ce parc social dégradé n’a pu que croître.
2°Les cités dites adaptées
Dans un rapport récent, réalisé avec l’aide de la Fondation Abbé Pierre et largement diffusé, nous avons décrit la situation d’abandon de plusieurs cités qui, à l’origine, correspondaient à un habitat adapté à la population gitane. Faute d’entretien et de suivi social, les conditions d’habitat dans ces cités sont de plus en plus précaires et, pour la plupart, nécessitent des travaux importants et parfois peut-être une démolition. De nombreuses familles souhaitent quitter ces cités toujours en sur-occupation. Les projets de démolition, souvent envisagés par les bailleurs, devront s’accompagner de programmes de construction adaptés. En dehors de Marseille, de telles cités subsistent à Aix-en-Provence. A Arles et Martigues des programmes de reconstruction ont permis de répondre pour partie à ces besoins. C’est environ 300 à 400 familles qui justifieraient d’un relogement ou d’une réhabilitation lourde dans ces cités.
L’habitat dans les quartiers anciens.
Dans la plupart des centres-villes du département des immeubles vétustes ont été acquits ou plus simplement squattés par des groupes familiaux qui ont rarement les moyens de remettre en état ou d’entretenir des logements pour la plupart insalubres. Leur mode de vie collective et ouvert vers l’extérieur est mal supporté par le voisinage, ce qui multiplie les sources de conflits. En raison de la dispersion de ces groupes dans les villes, leur nombre est difficile à estimer. Plusieurs sont cependant connus à Marseille dans le quartier de la Belle de Mai, à Aubagne ou encore dans le centre ancien d’Arles. On peut estimer qu’environ 500 familles sont concernées par ce type d’habitat indigne.
Les terrains familiaux.
L’étude réalisée à la demande de l’Etat et du Conseil Général en 2003 sur l’habitat de « gens du voyage » a mis en évidence la présence, dans de nombreuses communes du département, de familles tsiganes sédentarisées dans des conditions d’habitat le plus souvent très précaires. Sur plus de quarante communes, l’étude recensait 173 terrains sur lesquels séjournaient 588 ménages. Propriétaires ou locataires de terrains le plus souvent non constructibles, ces familles séjournent au mieux dans des caravanes ou des mobil homes ou dans des baraquements sommaires constituant des bidonvilles sans équipement sanitaire et parfois sans branchement à l’eau et l’électricité. Si certains d’entre eux ont pu régulariser leur situation administrative, la plupart font régulièrement l’objet de procédures de la part des maires ou des services de l’Etat. Nous avons pu constater que, depuis la réalisation de l’étude en 2003, le nombre de familles en voie de sédentarisation dans le département s’est notablement accru. Il ne se passe pas de semaine sans que nous soyons alertés pour venir en aide ou conseiller des personnes en butte à l’hostilité des institutions ou du voisinage et dans l’impossibilité d’avoir accès au minimum de services publics collectifs.
Cette augmentation des besoins est liée à plusieurs facteurs qui, en se conjuguant, font obstacle au droit au logement reconnu à ces personnes comme à chaque citoyen. L’absence récurrente de terrain d’accueil prévu par les lois sur les gens du voyage depuis plus de 18 ans contribue largement à contraindre les familles à trouver des terrains par leurs propres moyens. La durée de séjour limité à 2 mois dans les quatre aires d’accueil du département explique aussi ce choix. Si pour ces familles, l’habitat en caravane reste le moyen le plus répandu, la mobilité géographique se réduit pour des raisons économiques (coût des déplacements, recherche d’activité et de travail etc.) mais aussi pour des raisons sociales : scolarisation des enfants, accès aux soins, aux prestations sociales etc…
Dans leur grande majorité ces familles ne cherchent pas à accéder à un logement traditionnel, en particulier en habitat collectif social. Leurs besoins sont plus modestes puisqu’il s’agit essentiellement de terrains disposant d’un minimum d’équipement et permettant d’y installer un habitat mobile. Pour la plupart, en effet, elles n’ont pas renoncé définitivement au voyage, mais en réduisent l’usage dans le temps et dans l’espace. La création de terrains familiaux définis par la réglementation et des adaptations sur le droit des sols tels que prévu par la loi sur le logement en cours de débat au Parlement, devraient permettre de répondre à une bonne partie des besoins en logement exprimé par ces familles. Une mise à jour de l’enquête réalisée en 2003 paraît utile, mais, d’ores et déjà, nous estimons que la perspective de terrains familiaux à régulariser ou à créer concerne environ un millier de familles dans le département.
Synthèse.
L’addition des différents facteurs décrits ci-dessus fait apparaître qu’environ 3000 familles d’origine tsigane peuvent, dans le département, être considérées comme mal-logés ou sans logement et relever du plan départemental. Rappelons toutefois que les éléments présentés et en particulier les estimations avancées ne prétendent pas avoir une valeur scientifique incontestable. Il s’agit d’un ordre de grandeur des besoins en habitat d’une population trop souvent oubliée dans les enquêtes. Nous pouvons toutefois affirmer que, en fonction des relations établies depuis plusieurs années avec nombre d’entre elles, ces familles relèvent bien d’un public défavorisé au sens de la loi.
Les solutions à mettre en œuvre ne sauraient se limiter à proposer des logements sociaux classiques même si, pour certaines familles, cette hypothèse n’est pas exclue. Par contre les programmes déjà expérimentés avec succès d’habitats adaptés ou de terrain familiaux sont à privilégier en concertation avec les intéressés eux-mêmes.
Marseille le 2/11/2008