{{ {{{Les boucs émissaires}}} }}
Il y a moins d’un mois nous lancions un cri d’alarme sur les risques d’incidents ou de conflits susceptibles d’intervenir dans la région en raison des conditions d’accueil quasi inexistantes faites aux gens du voyage. Notre inquiétude s’est hélas trouvée largement confirmée par les divers évènements survenus durant ce mois de juillet.
Les termes scandaleux de la lettre rendue publique par du maire de Bormes-les-Mimosas et dénoncés à juste titre par les associations ne sont, hélas, que le reflet de ce que pense une part non négligeable des élus et responsables de cette région, largement appuyés par leurs administrés. Les propos tenus récemment par Madame le maire d’Aix-en-Provence ou encore ceux des maires de Cogolin ou de Nice, reflètent une intolérance qui va croissant et qui ne peut qu’aggraver les incompréhensions et la fracture entre la population et les tsiganes, qu’ils soient voyageurs, sédentaires ou Roms venus du reste de l’Europe.
Ces propos et ces comportements intolérables largement repris par les médias, ne sont que rarement et très timidement mis en cause par les responsables politiques, intellectuels ou religieux. Seule une partie du mouvement associatif, défenseur des droits de l’homme ou représentant des voyageurs, tente d’alerter l’opinion sur les dangers d’une telle évolution.
La région Provence-Alpes-Côte-d’Azur n’a, malheureusement, pas le triste privilège de tels comportements. La lecture de la presse régionale ou nationale montre que, de Lille à Bordeaux en passant par la Bretagne, les communes ne sont guère plus accueillantes dans le reste du pays. En Italie, les récentes mesures de fichage et d’expulsion prises par le gouvernement de Silvio Berlusconi relèvent du même rejet d’une population jugée indésirable. Même s’il convient de prendre garde d’une assimilation hâtive entre les différentes communautés trop rapidement désignées sous le terme ambigu de « gens du voyage », on ne peut que s’élever contre une telle évolution des comportements, des mentalités et des propos qui remettent en cause les valeurs essentielles de la démocratie et le respect des droits fondamentaux.
Comme à l’accoutumé on nous rétorquera que ces « gens-là n’acceptent pas les règles de vie commune, que leurs ressources sont contestables, qu’ils se replient dans une attitude d’hostilité et de refus et qu’ils créent des nuisances là où ils s’installent » Ne nions pas en effet certains comportements et certains gestes regrettables sinon dramatiques comme le montre le sanglant affrontement survenu sur le terrain de la Ripelle à Toulon ou encore le meurtre de José par un gendarme à Draguignan. On peut également contester l’attitude de certains groupes importants de voyageurs qui s’engagent, parfois dans un rapport de force avec les maires sans toujours en mesurer les conséquences négatives sur l’opinion. De même, l’installation permanente de caravanes et de mobil-home sur des terrains non-constructibles ne peut être une solution à recommander.
Ces comportements contestables qui demeurent toutefois exceptionnels servent trop souvent d’alibis aux élus pour rejeter sans nuance toute une communauté qui ne demande qu’à vivre en paix pour peu que l’on réponde à leurs attentes et que les lois les concernant soient enfin mises en application. Le récent rapport du Sénateur HERISSON au premier Ministre a le mérite de mettre en lumière les insuffisances de la politique nationale en ce domaine. On ne peut que souhaiter que sur le terrain et sans délai, les pouvoirs publics prennent la mesure de l’urgence à agir pour répondre à ces attentes.
Alain FOUREST
Marseille le 4/08/08