Les Roms migrants dans la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur

{{{L’accueil des Roms migrants en Provence-Alpes-Côte-d’Azur
Mars 2007}}}

{2{De qui parle -t-on ?}2}

Les personnes que l’on désigne couramment sous cette appellation sont pour leur grande majorité originaires de différents pays de l’Europe de l’Est. (Pays des Balkans : Bulgarie, Roumanie, Hongrie, mais aussi ex-Yougoslavie Bosnie Serbie, Kosovo etc…) Ils appartiennent à la communauté Roms originaire de l’Inde et reconnue comme une minorité dans ces pays. Sous le régime communiste, ils ont été sédentarisés dans des quartiers à part, mais ont acquis un certain nombre de droits en matière culturelle et même politique.

La disparition des régimes communistes a profondément modifié leur situation en leur permettant une plus grande mobilité mais aussi en faisant resurgir au grand jour des attitudes de racisme et d’exclusion de la part des populations autochtones. Pour un grand nombre de ces familles, le libéralisme économique a eu pour conséquences une aggravation de leurs conditions de vie et une marginalisation sociale. Dans l’ex-Yougoslavie, ils ont été pris dans les conflits interethniques et interreligieux auxquels ils ont été mêlés parfois de manière contrainte et ils en subissent encore aujourd’hui les conséquences dramatiques.

Ils sont présents en France et dans la région de manière significative depuis déjà une quinzaine d’années. Ils apparaissent en plus grand nombre depuis peu en raison de la libre circulation dans les nouveaux Etats membres de l’Union Européenne mais aussi des politiques d’accueil plus restrictives de l’Allemagne et de l’Italie.

Il convient ici de dénoncer un amalgame fréquent et pernicieux qui consiste à confondre tous les groupes de Roms tsiganes sous un même vocable et un même rejet, qu’ils soient de nationalité étrangère récemment arrivés ou français depuis de nombreuses générations. Même s’ils peuvent à bon droit revendiquer une histoire et parfois une culture commune, il serait particulièrement abusif de les considérer comme une communauté homogène en exigeant d’eux un comportement unique et une solidarité à toute épreuve.

{2{Leurs statuts}2}

Selon la date et les motifs de leur arrivée mais aussi le pays dont ils sont originaires, ils peuvent relever de statuts très divers : réfugiés politiques, demandeurs d’asile, détenteurs d’une carte de séjour, ou « simples touristes » avec autorisation de séjour de moins de trois mois. Depuis le 1er janvier 2007 les Roms originaires de Roumanie et de Bulgarie peuvent obtenir une carte de séjour s’ils disposent d’un contrat de travail pour l’un des 62 métiers qui leurs sont ouverts. La complexité et souvent l’imbroglio juridique dont ils sont l’objet conduisent le plus souvent à les rendre non expulsables mais aussi non régularisables. L’absence de statut et de ressources stables les conduit à recourir pour survivre au travail clandestin, à la mendicité et parfois aux trafics en tout genre.

En matière d’habitat, la crise du logement social en France ne leur laisse aucun espoir d’accéder à un habitat décent. Ils sont ainsi contraints de survivre en marge de notre société dans un habitat précaire (caravanes, squats, friches industrielles) reconstituant ainsi de nouveau bidonvilles.

Malgré la diversité des origines, des statuts, des langues et des conditions de vie, on peut résumer ainsi tout ce qu’ils partagent aujourd’hui en France :

-Une histoire récente et douloureuse faite de violences, de racisme et de misère.

-Un rejet généralisé de la société d’accueil qui, par ignorance et peur mais aussi souvent par une idéologie et un racisme le plus avérés, se refuse à reconnaître la réalité de leur présence et leur droit à vivre dignement.

{2{Les Roms dans la région}2}

Alors que dans l’agglomération parisienne et lyonnaise la présence des Roms est déjà ancienne et visible, dans la région Provence-Alpes-Côte-d’azur, elle semble plus récente et plus discrète.

On note leur arrivée dans les Alpes-Maritimes en 1998 à la suite d’une interpellation musclée d’un groupe familial par la police des frontières qui s’est soldée par la mort d’un adolescent. Dans le Var, un groupe de famille qui séjourne depuis 3 ans à Fréjus est accompagné par plusieurs associations caritatives malgré l’hostilité permanente de la municipalité. Dans le Vaucluse plusieurs groupes séjournent à Avignon et dans les communes environnantes.

Une premier groupe arrivé à Marseille il y a dix ans, fuyant la guerre de Bosnie, s’est regroupé au parc Bellevue. Ils en ont été chassés par la réhabilitation de la cité et se sont dispersés dans la ville au gré des squats et des immeubles laissés à l’abandon. En 2005 trois personnes sont mortes à la suite de l’incendie d’un immeuble dans le quartier de Noailles. Des familles sont également présentes dans plusieurs locaux industriels à l’abandon dans le XVème arrondissement.

Au printemps 2006 un groupe de Roms roumains qui campaient à la Porte d’Aix ont été expulsés et pourchassés dans divers lieux de la ville. Regroupés près de la Belle de Mai, ils sont menacés à nouveau d’expulsion par les autorités locales. Ce ne sont là que quelques exemples qui ne prétendent pas à l’exhaustivité. De manière régulière, on peut voir aux carrefours et dans les rues de la ville ces personnes qui mendient ou qui chargent sur des poussettes les rejets de nos déchets urbains.

Dans les Bouches-du-Rhône, on signale également des familles Roms à Aix-en-Provence. Un groupe d’une vingtaine de familles campait dans des abris de fortune à côté de la gare TGV et de l’aire d’accueil des voyageurs français. Après une première intervention municipale musclée en 2003, les branchements d‘eau et d’électricité ont été coupés et le groupe s’est dispersé laissant deux familles avec de nombreux enfants. L’une d’elles a pu être relogée, l’autre survit depuis 6 mois grâce à la seule intervention d’associations et de bénévoles. D’autres groupes stationnent également sur les communes de Chateauneuf-les-Martigues et Marignane. . Un groupe important est installé depuis près de quatre ans sur un terrain aux limites des communes de Berre et de Rognac.

Dans chacun de ces cas, les conditions d’hygiène et de sécurité de ces personnes sont particulièrement précaires et ce sont de véritables bidonvilles que l’on voit se reconstituer au fil des ans.
{2{
Il est grand temps d’agir}2}

Face à une telle situation, plusieurs associations ont tenté de nouer des contacts avec ces familles afin de parer aux urgences sanitaires médicales ou simplement alimentaires. Certains enfants ont pu être scolarisés, des démarches ont été entreprises pour régulariser la situation de quelques personnes. Les membres de Rencontres Tsiganes ont participé à ce mouvement de solidarité en cherchant à comprendre les attentes de ces personnes et leur projet et en s’opposant parfois aux mesures d’expulsion policière.

Il y a trois ans déjà nous avons attiré l’attention des pouvoirs publics (Préfecture, mairies, Conseil Général) sur les conditions inadmissibles dans lesquelles survivent ces personnes et en particulier celles chargées d’enfants. Nous attirions leur attention sur l’inefficacité des seules mesures policières et sur la nécessité d’une concertation avec les responsables associatifs afin d’échanger nos informations et nos expériences et proposer des solutions réalistes.

A ce jour et malgré de multiples relances toutes ces démarches n’ont trouvé qu’une fin de non-recevoir.

Une telle attitude, de la part des élus comme des services de l’Etat, nous semble à la fois irresponsable et dangereuse. Elle ne peut que conduire à une marginalisation encore accrue de ces personnes et, comme c’est déjà trop souvent le cas, à une attitude hostile de la part des populations locales perturbées par cette promiscuité.

Les informations que nous avons pu recueillir grâce au réseau national Rom Europe animé par Médecins du Monde , montre que dans d’autres régions et départements des solutions ont pu être mises en œuvre utilement dans le respect des droits de chacun et dans un souci humanitaire. Par ailleurs l’Union européenne a, à plusieurs reprises, mis en cause l’attitude de la France en ce domaine et recommandé des exemples pratiques de lutte contre le racisme et l’intolérance à l’égard des Roms/Tsiganes en France. Il nous semble urgent de tenir compte de ces recommandations et de les mettre en pratique.
Marseille le 27/02/2007


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