Une manipulation médiatique

L’article ci dessous  paru dans le journal "La Provence" nous  conduit  à dénoncer cette manipulation de l’opinion laissant croire que l’Etat fait preuve de mansuétude.

« Rom-Lanta Academy »

 

Les Roms sont-ils des gens normaux ? Les Roms peuvent-ils s’intégrer ? Que se passe-t-il quand on teste leur « capacité d’intégration » en milieu hostile ?

 

La Préfecture a décidé de lancer le défi. A grand renfort de publicité, elle communique. Dix familles Roms ont été présélectionnées pour participer à une expérience « unique en France » digne de nos meilleurs jeux de reality show et qui propose de faire émerger de nouveaux talents « citoyens ».

Sur les quelques 3000 participants au casting, seuls une poignée de candidats apprentis citoyens sont retenus. Les autres subissent la dure loi du harcèlement quotidien, des évacuations et des expulsions massives, mais c’est la règle du jeu.

A l’issu du conseil, environ 2950 aspirants à une vie meilleure reprendront leurs sacs, leurs flambeaux et quitteront définitivement l’aventure pour un aller simple vers les Carpates.

La sentence est irrévocable !

 

Les heureux élus ayant passé la première épreuve du tri sélectif et qui ont su répondre à des « conditions strictes sur leurs capacités d’intégration » se voient délivrer « un titre de séjour à titre dérogatoire ». En fait, surtout dérogatoire au regard du Droit européen puisque ces personnes sont des citoyens de l’Union et qu’elles ne devraient pas en avoir besoin. Mais bon, les règles du jeu ne doivent jamais être très claires, c’est la clef du succès.

Munies de ce précieux sésame, les lauréats sont autorisés à poursuivre la compétition sous l’œil vigilant et suspicieux des examinateurs.

Car attention ! Ces titres de séjour sont accordés « à titre provisoire » et ce généreux dispositif est bien sûr « révocable » à tout moment. Chaque épreuve est éliminatoire. Encore une fois, c’est la règle du jeu et il faut l’accepter. Il n’est, bien sûr, pas question que les tests soient trop faciles puisqu’il doit y avoir des gagnants et des perdants.

 

Ces familles devront faire des efforts, faire preuve de bonne volonté, passer tous les obstacles avec succès et bien sûr respecter les règles. Elles vont avoir six mois « pour devenir des familles modèles » qu’on pourra enfin accepter, sinon tolérer. Bref, un jeu plein de rebondissements qui va s’étaler sur de longues semaines pendant lesquelles le moindre faux pas sera fatal. La sanction peut tomber à tout instant : charter pour les Carpates, aller simple. La sentence est irrévocable !

 

Rencontres Tsiganes ne s’associera pas à ce jeu où l’on met en vitrine quelques « bons Roms » pour justifier ou passer sous silence les expulsions et le traitement indigne infligé à des milliers d’autres !

Rencontres Tsiganes ne cautionnera pas cette expérimentation censée prouver que les Roms sont des gens « normaux » comme si cela avait besoin d’être prouvé !

Rencontres Tsiganes ne participera pas à cette loterie malsaine qui ne fait que rajouter de la discrimination à la discrimination, ni comme sélectionneur, ni comme examinateur, ni même comme spectateur !

Nous exigeons la fin des expulsions et la mise en place à l’échelle régionale d’une véritable politique d’accueil pour toutes ces familles afin de leur offrir des conditions d’existence décentes permettant un suivi sanitaire et social normal et qui seule pourra permettre de les aider à construire leurs projets de vie ici ou dans leur pays d’origine en respectant leurs choix, leurs aspirations et leur dignité.

 

Jean Paul KOPP 

Rencontres Tsiganes

 

Ce communiqué fait suite à un article paru sur le site de la Provence le 3 octobre 2010 : http://www.laprovence.com/article/region/marseille-ces-roms-qui-peuvent-rester d’offrir à ces familles des conditions d’existence décentes et dignes et de les aider à bâtir leurs projets de vie en respectant leurs choix et leurs aspirations.

 

 

Marseille : ces Roms qui peuvent rester

 
Publié le dimanche 03 octobre 2010 à 18H17
 
A Marseille, 10 familles ont reçu un titre de séjour à titre dérogatoire. Objectif : tester leur capacité d’intégration Monica, Ioan et leurs 4 enfants font partie des 10 familles sélectionnées pour bénéficier d’une aide à l’intégration. Monica, Ioan et leurs 4 enfants font partie des 10 familles sélectionnées pour bénéficier d’une aide à l’intégration.
 
Il y a des rideaux en dentelle aux fenêtres, une soucoupe de calissons sur la toile cirée, et dans le coin cuisine impeccablement astiqué, une, non deux machines à laver. "Maintenant que je travaille, je n’ai plus le temps de nettoyer le linge à la main", sourit Monica, pas peu fière de nous faire visiter le petit appartement du Panier que sa famille loue depuis juin dernier. Un toit, enfin, à deux pas de la place du Refuge.
 
Tout un symbole pour Monica et Ioan son mari, qui depuis leur arrivée à Marseille il y a 8 ans, n’ont connu que l’errance de squat en squat, leurs 4 enfants dans les bagages. "C’est la première fois qu’on s’endort le soir sans la peur d’être expulsés le lendemain matin". La première rentrée scolaire aussi pour Marcel et André, les petits derniers (6 et 12 ans). "Avant on avait peur de se faire repérer en les mettant les enfants l’école. Et puis on n’était jamais sûrs d’être encore là à leur retour".
 
Mais cette vie d’"invisibles", comme les Roms se surnomment eux-mêmes, c’est déjà du passé pour Monica et Ioan. Comme 10 autres familles Roms de Marseille, ce couple a été admis à exister au grand jour. Une dérogation exceptionnelle de la Préfecture leur accorde un titre de séjour. Donc le droit de travailler. Donc la possibilité de trouver un logement.
 
Alors que leurs parents, voisins, amis de Timisoara (la région d’origine de la plupart des Roms de Marseille) sont poussés aux frontières, ces privilégiés, qui répondent à des conditions strictes sur leur capacité d’intégration, bénéficient de ce dispositif unique en France. Mais qui reste révocable : les titres de séjour étant accordés à titre provisoires, Monica et Ioan, savent qu’ils ont six mois pour devenir une famille "modèle". Et le challenge ne leur fait pas peur.
 
D’abord parce que Monica a trouvé un emploi déclaré "en cuisine, dans un restaurant du Panier". Et surtout, dit Ioan, parce qu’il n’existe "pas d’autre choix" : "Nous avons quitté la Roumanie parce là-bas, même si tu travailles, tu ne peux pas nourrir tes enfants. Moi j’étais agriculteur, ma femme employée dans une usine de câbles. On gagnait 100€ par mois. Avec ça, tu ne manges pas".
 
En France, c’est Ioan et son aîné qui ont fait bouillir la marmite : le premier jouait du violon dans les restos, l’autre tendait la main aux carrefours. Dormir dans des squats ou entassés dans une carcasse de voiture, faire la manche, récupérer de la ferraille, "ce n’est pas culturel pour les Roms, juste une question de survie", martèle Marion Bonnet, coordinatrice de la mission Rom à l’Ampil.
 
Alors la chance qui lui est offerte aujourd’hui, ce couple ne la laissera pas passer. "Maintenant, le soir, à table, avec nos deux garçons qui ont grandi ici, ont parle français. Moi, je me sens déjà Marseillais", rigole Ioan en montrant son maillot de l’OM. Les supporters de l’équipe, ce sont Marcel et André, qui tous les soirs après l’école, refond le match avec les gamins du Panier.
 
"Ici, les gens sont très gentils, tout le monde nous a déjà acceptés", assure Monica. Tous, ou presque : il y a quelques jours, un policier est venu frapper à sa porte. Un voisin avait signalé que l’appartement était squatté. "On lui a montré nos papiers, il s’est excusé", raconte Monica, consciente que "qui dit Rom dit squat. C’est cette image que nous voulons changer".
Sophie MANELLI
 Photo Cyril Sollier
 
 

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