Un article du journal le Monde daté du 9 octobre met en lumière les dérives de la gendarmerie et l’utilisation de fichiers illégaux s’appliquant au MENS (Minorités Ethniques Non Sédentaires )
Noua avons déjà eu l’occasion il y a deux ans de dénoncer cette "particularité" française . Tant mieux si aujourd’hui cette information soulève une plus grande émotion et contraint les autorités policières à plus de prudence. Mais pour notre part nous sommes sans illusion. Il en faudra beaucoup plus pour que la police et la gendarmerie reconnaissent les Tsiganes pour des citoyens à part entière et renoncent à suivre à la trace leurs ‘"attelages "
EDITO mai 2008
Une nouvelle catégorie de citoyens ? : les MENS
Ce terme qui est apparu dans la presse locale, serait une nouvelle expression permettant d’éviter, semble-t-il, l’emploi des mots « tsiganes, gitans ou gens du voyage ». Il a été employé, dans un article relatant les méfaits d’une bande de voleurs qu’une vaste opération de police et de gendarmerie à permis de neutraliser et dont les médias ont largement rendu compte. En employant ce nouveau qualificatif pour le moins surprenant (Minorité Ethnique Non Sédentaire) il s’agirait d’éviter d’être soupçonné de discrimination, voir de racisme. C’est peut-être là une réponse indirecte aux interventions que nous avons faites récemment auprès de l’AFP et de la gendarmerie afin de dénoncer la méthode qui consiste à désigner des délinquants par leur appartenance à un groupe social bien déterminé ou encore par les lieux qu’ils fréquent: les camps de gitans ou de gens du voyage. C’est ainsi l’ensemble d’un groupe de citoyens qui est présenté à la vindicte populaire justifiant les traditionnels préjugés sans cesse renouvelés : « mais de quoi vivent-ils ? avec leurs grosses voitures… C’est bien connu, ce sont tous des voleurs … » Ce sont les termes employés à plusieurs reprises par le préfet Girod de Langlade et qui lui ont valu une condamnation dont il a fait appel.
Certains pourront juger ce débat sémantique comme anecdotique. Ils auront tort. En effet, à travers de nouvelles circonlocutions, il s’agit bien d’une même démarche consistant à prendre la partie pour le tout et à désigner à l’opinion une catégorie sociale comme nuisible et inassimilable. Que l’on appelle cela du racisme ou de la discrimination, qu’importe ! Pour ceux qui en sont l’objet, c’est chaque fois une marque de rejet qui blesse la grande majorité d’entre eux qui s’efforcent de se comporter en citoyens respectueux des lois de la République. Que répondre aux amis voyageurs auquel on renvoie les images stigmatisantes vues à la télé la veille ou les articles du quotidien ? En quelques instants est ainsi remis en cause tout le travail quotidien de nos associations qui tentent de présenter la culture, l’histoire et les valeurs portées par le peuple tsigane.
Il faut que cesse cette hypocrisie collective et que l’on reconnaisse qu’aujourd’hui encore, dans notre société française, environ 500 000 personnes font l’objet de rejet en vertu de leur origine et de leur culture. Tant que, sous prétexte de répondre à leurs besoins, on édictera des lois spécifiques pour les « gens du voyage’ , on en fera des citoyens de deuxième catégorie.
Les recommandations des divers instances européennes nous rappellent régulièrement l’urgence d’un traitement équitable des Roms Tsiganes. Mais les propos et les mesures récemment décidées par le gouvernement Italien et le maire de Rome sont sans ambiguïté. La chasse aux Roms Tsiganes est ouverte à travers l’Europe. En Hongrie, par exemple, la « Garde Hongroise » (milice d’extrême droite) préfère une cible plus populiste que les juifs et veut protéger les Hongrois contre la criminalité rom : «elle reconnaît qu’elle ne peut pas jouer la carte de l’antisémitisme, elle risquerait de se délégitimer davantage qu’en jouant la carte anti-Rom »
Il est grand temps d’ouvrir les yeux et reconnaître que la « bête immonde » est toujours en éveil parmi nous. Les premiers concernés prennent conscience du danger qui s’approche. Ils s’efforcent de surmonter leurs divisions pour réagir ensemble. La création récente d’un Collectif National de Gens du Voyage, regroupant Roms-gitans-Manouchess-Sintis-Yeniches, est une bonne nouvelle Il faut les soutenir, leur projet nous concerne tous : « Ensemble nous pourrons vivre notre différence »
Alain FOUREST Marseille le 17/05/2008