Des maires en guerre contre l’achat de terrain par les tsiganes

{{Des maires en guerre contre le juteux trafic de terrains}}

Le Parisien , jeudi 21 juin 2007

A l’abri d’un bois, d’un espace naturel protégé ou d’une zone inondable en bordure de rivière, les terrains vagues sont une terre d’accueil rêvée pour les gens du voyage en quête de sédentarisation. Des parcelles inconstructibles, sans eau courante ni électricité, qui font pourtant depuis peu l’objet de transactions bien juteuses. Certains propriétaires sans scrupules passent devant le notaire pour transmettre leur bien par le biais d’une donation en bonne et due forme. En échange, le nouvel acquéreur remet au « vendeur » une enveloppe financière échappant à toute déclaration auprès des services fiscaux.
Le procureur de la République de Meaux et l’Union des maires de Seine-et-Marne viennent d’alerter la chambre départementale des notaires. Son président, Jean-Louis Le Guyader , a aussitôt lancé à ses confrères un appel à la vigilance : « En fonction de son expérience et surtout de la nature du bien, le notaire doit refuser de prêter son concours à la rédaction d’un acte qui sortirait du champ normal de la donation. Surtout s’il s’agit de contourner le droit de préemption des communes. »
Car c’est pour échapper au rachat de leurs terres par les communes que certains propriétaires ont recours à la donation. Les maires de Quincy-Voisins, de Couilly-Pont-aux-Dames, de Crécy-la-Chapelle ou Voulangis ont ainsi donné l’alerte sur cette nouvelle pratique. Pour beaucoup d’édiles, l’occupation de terrains non constructibles est un vrai casse-tête (lire ci-contre). Dès qu’un lopin de terre est mis en vente, ils exercent aussitôt leur droit de préemption pour le racheter.

Ils dénoncent des « implantations sauvages » dans des « zones non constructibles »

« Parfois, les propriétaires refusent de vendre, car le prix d’achat est souvent celui des terres agricoles », constate Michel Houel, sénateur-maire (UMP) de Crécy et président de l’Union des maires. « Ils ont donc trouvé une astuce en faisant une donation à des acquéreurs qui n’ont pourtant aucun lien de parenté. » Avec à la clé pour le propriétaire, un pactole qui échappe aux impôts. « Pour préserver les espaces boisés ou agricoles, la Safer (NDLR : Société d’aménagement foncier et d’établissement rural ) peut par exemple préempter à 1 € le mètre carré, explique Jean-Jacques Jégo, maire (PC) de Quincy-Voisins. Dans le cas d’une transaction sous le manteau, il semble que le mètre carré se négocie jusqu’à 100 € ! »
Les conseils municipaux de Couilly et de Quincy-Voisins ont adressé une motion aux députés et sénateurs, dénonçant « une pratique dévoyée de l’acte de donation » : « Les terrains concernés sont situés en zones non constructibles, parfois même protégées et classées, et font ensuite l’objet d’implantations sauvages et illégales, bafouant les plus simples règles d’urbanisme et d’hygiène. » Les élus réclament un contrôle « des donations sans lien de parenté pour les espaces agricoles et forestiers » par les « Safer et les collectivités locales ».
Du côté de l’Union des maires, on s’en remet « à la vigilance et au bon sens des notaires ». « Le notaire est un officier ministériel, rappelle René Pech, procureur de la République de Meaux. Il a un devoir de conseil, d’impartialité et doit vérifier la régularité des opérations. Sinon, il s’expose à des poursuites disciplinaires. »
Stéphanie Auguy


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