Rassemblement annuel des Tsiganes évangélistes

{{{Trente mille Tziganes sont attendus en Moselle pour leur grand rassemblement annuel}}}
LE MONDE | 17.08.06

Par centaines, les caravanes ont commencé à affluer, mercredi 16 août, sur la base militaire de Grostenquin (Moselle), à quelques jours du coup d’envoi de la Convention nationale évangélique des gens du voyage, qui doit se dérouler du 23 au 27 août, à l’appel de Vie et Lumière, mouvement pentecôtiste rattaché à la Fédération protestante de France. Les premiers pèlerins sont arrivés deux jours plus tôt que prévu dans cette commune rurale proche de la frontière allemande, alors qu’organisateurs et services de l’Etat terminaient d’aménager la plate-forme, une ancienne base de l’OTAN de 400 hectares.

Sous la pression des élus locaux, Daniel Ferey, préfet par intérim, a consenti à ouvrir le site dès mercredi – et non vendredi comme envisagé initialement -, de manière à libérer les aires de stationnement, terrains agricoles et voies d’accès occupés par les convois de voyageurs qui, de toute la France et des pays limitrophes, convergeaient vers Grostenquin. Trente mille Tziganes sont attendus pour ce rassemblement, organisé chaque année sur un site choisi par l’Etat.

Un immense chapiteau, sous lequel seront célébrés les offices et baptêmes d’adultes par immersion, a été dressé mercredi. Auparavant, et dans un temps record, les services de l’Equipement et de la protection civile s’étaient employés à « viabiliser » le site : 1 800 barrières formant une ceinture métallique de 4,5 kilomètres ont été installées le long des pistes, afin de délimiter le périmètre de 160 hectares que les pèlerins seront autorisés à occuper. Vétustes, les bâtiments et hangars ont été exclus de la zone pour des raisons de sécurité. Une brèche a été ouverte à coups de bulldozer de manière à aménager un second accès pour les secours. Des plaques métalliques ont été posées dans la boue pour permettre aux véhicules de passer. D’immenses tuyaux ont été tirés pour l’alimentation en eau potable. Des sanitaires chimiques ont été installés, une entreprise privée a été sollicitée pour organiser l’assainissement et le traitement des ordures. Des groupes électrogènes seront mis en service pour alimenter un dispensaire de campagne, où une centaine de consultations pourront être assurées quotidiennement par des médecins volontaires.

Les commerçants locaux ont été sollicités pour participer aux ravitaillements de cette ville éphémère, deux fois plus peuplée que Saint-Avold, la cité la plus proche, qui compte 14 000 habitants. Côté sécurité, trois escadrons de gendarmerie mobile viendront renforcer les brigades du secteur ainsi que le service d’ordre – une centaine d’hommes – du comité organisateur.

Répondant aux inquiétudes des élus locaux, affolés à l’idée de voir tripler en si peu de temps la population de leur canton, le préfet a assuré que « la plupart des prestations seront facturées aux organisateurs ». Un chèque de garantie de 60 000 euros a déjà été déposé par Vie et Lumière, pour le paiement des fournitures.

« AU PIED DU MUR »

Cette année encore, la tenue de la manifestation a suscité une vive polémique. « Si les communes du secteur devaient débourser 1 centime, je démissionnerais aussitôt », avait menacé Claude Bitte, conseiller général (UMP) du canton de Grostenquin. Informé le 27 juillet du choix de « ses » terres pour la tenue du pèlerinage, cet élu avait protesté en haut lieu. Dans un courrier à Nicolas Sarkozy, ministre de l’intérieur, il se disait « scandalisé » d’avoir été mis ainsi « au pied du mur ». Mercredi après-midi, en visitant le site, investi en quelques heures par 2 500 caravanes, l’élu se disait « rassuré ». « Cela dit, je ne peux pas faire un pas sans être interpellé sur cette manifestation, qui continue à inquiéter la population locale », confiait-il.

Guide spirituel de la communauté tzigane, le pasteur Joseph Charpentier multiplie les contacts sur place pour « rassurer » les autochtones. « Nous sommes là pour prier, mais ce rassemblement est aussi un moyen, pour notre communauté, de faire tomber les préjugés et de montrer aux riverains que nous pouvons cohabiter en harmonie. Toutes nos célébrations seront ouvertes aux gens de l’extérieur. » Et d’ajouter : « Si nos rassemblements se passaient mal, l’Etat ne mettrait pas chaque année à notre disposition des aires d’accueil aussi vastes. »
Nicolas Bastuck
Article paru dans l’édition du 18.08.06


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