L’audition et la lecture de ces quatre heures de débats laisse un goût amer sur le fonctionnement parlementaire. La lecture du compte rendu permet cependant de mesurer la complexité du travail législatif.
Moins d’une quinzaine de Sénateurs présents dans l’hémicycle durant quatre heures ont discuté de la situation des gens du voyage à l’occasion d’un projet de loi parlementaire présenté par le Sénateur HERISSON par ailleurs encore président de la commission Nationale de Gens du voyage. Le caractère quasi surréaliste de ces débats n’est pas à l’honneur de la représentation parlementaire
Une explication technique préalable s’avère nécessaire.
Cette proposition de loi (à la différence d’un projet de loi présenté par le gouvernement) a pour origine un groupe du Sénat (le groupe UMP présidé par HERISSON) dans le cadre d’une niche parlementaire.Chaque groupe dispose de quelques niches durant chaque session et chaque projet ne peut faire l’objet que de quatre heures de débats. Pour faire obstacle à un projet, il suffit donc de multiplier en cours de séance publique les amendements même les plus farfelus et hors sujet pour faire durer la séance et au bout de quatre heures reporter la discussion a une éventuelle autre niche.
C’est ce qui s’est passé lors de la séance de Mardi dernier. Pour la deuxième fois le Sénateur UMP Pierre Hérisson représentait un texte déjà étudié le 12 décembre 2013 qui avait pour but essentiel comme il l’annonçait de donner un coup de mains aux maires affrontés à l’arrivée imprévue de grand groupe de Gens du voyage. Ce projet essentiellement répressif devait fixer augmenter de 3750 à 7500 EUR l’amende infligée à ces groupes assortie de 6 mois à 12 mois de prison.
La fragile majorité sénatoriale présente durant la séance avait dénoncé cette proposition et devait éviter de se retrouver en minorité lors du vote final. Les Sénateurs de gauche présents ont donc joué la montre en multipliant les interventions et les propositions d’amendements. Lorsque la cloche a sonné au bout de quatre heures le texte a donc une nouvelle fois été repoussé faute de temps.
Cette mécanique politicienne dérisoire est dénoncée par les sénateurs eux-mêmes , mais pour le fonctionnement de la démocratie parlementaire cette triste mascarade est inquiétante.
La lecture détaillée du compte-rendu de la séance disponible sur le site du Sénat (en pièce jointe) est cependant riche d’enseignements. Si certains intervenants font preuve d’une connaissance à minima du dossier gens du voyage et de la législation les concernant beaucoup d’autres se contentent de répéter les préjugés en cours sinon de stigmatiser une population dont ils ignorent tout.
Seuls deux ou trois Sénateurs (Esther Benbassa, Jean Pierre Michel) semblent au fait du dossier et faire des propositions sérieuses. On notera cependant le souci permanent d’un équilibre entre droits des voyageurs et pouvoirs de police des maires. Si, sur certains points, une majorité semble possible pour des aménagements de la législation concernant les gens du voyage, il ne faut cependant pas attendre des Sénateurs des réponses satisfaisantes aux principales questions soulevées par les associations et els gens du voyage.
Plus concrètement c’est la proposition de loi déposée le 5 décembre 2013 par le député Dominique Raimbourg au nom de la majorité de l’Assemblée qui donnera le la. Encore faut-il que cette proposition soit inscrite rapidement à l’ordre du jour de l’Assemblée Nationale. C’est ce qu’ont demandé à juste titre les Sénateurs mardi.
Nota
En marge du dossier on a noté que le Sénateur Serge DASSAULT a fait une courte apparition en séance le 11 février. Il a curieusement demandé la parole pour un rappel au règlement puis constatant le faible nombre de présents dans l’hémicycle il a disparu.
En fin de séance la reconnaissance du génocide tsigane mis en avant par un Sénateur a fait l’objet d’interventions diverses sous la forme compassionnelle. Cette proposition a été repoussée parce en dehors du sujet !