Les familles sédentarisées dans la région

Programme national de lutte
contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale

L’habitat des communautés Tsiganes dans la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur

1° Les objectifs du plan et sa déclinaison régionale

Un plan quinquennal de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale a été arrêté par le Gouvernement le 21 janvier 2013. Ce plan prévoit parmi ses engagements dans le domaine du logement et de l’hébergement, la réalisation de diagnostics territoriaux portant sur toutes les situations précaires à prendre en charge de la rue au mal logement en passant par l’habitat indigne. Le 28 juin 2013 à la Préfecture de Région, sous la Présidence de François CHEREQUE, les assises territoriales de lutte contre la pauvreté ont eu pour objet de décliner régionalement ce programme national. Après une première phase d’expérimentation engagée en juin dans quatre départements, les Bouches-du-Rhône ont été retenues pour une deuxième vague prévue à partir de septembre 2013. Il s’agit de la réalisation de diagnostics territoriaux partagés « à 360° » du sans abrisme au mal logement.

Parmi les publics prioritaires, à prendre en considération dans la démarche, les communautés tsiganes marginalisées sont explicitement citées.

Le plan national du 23 janvier précise :
Mettre en place une politique à l’égard de l’habitat des Gens du Voyage
Le Gouvernement souhaite que s’engage une dynamique interministérielle pour la mise en place d’une politique en faveur des gens du voyage. L’Etat et les collectivités territoriales seront mobilisés pour le développement des aires d’accueil et l’amélioration de l’accompagnement social des gens du voyage. Cette mobilisation s’accompagnera d’une réflexion sur le statut juridique de la caravane du point de vue du droit de l’habitat. D’une façon plus large, une réforme sera menée par le Gouvernement, en 2014, quant au statut des Gens du Voyage, à leur circulation et à l’obligation d’accueil par les communes.

2° Le contexte régional

L’association Rencontres Tsiganes en Provence-Alpes-Côte-d’Azur alerte régulièrement depuis près de 15 ans, les pouvoirs publics sur les conditions d’habitat le plus souvent indignes de plusieurs milliers de familles désignées sous divers qualificatifs : gens du voyage, gitans, manouches ou encore tsiganes. Ces personnes de nationalité française depuis plusieurs générations sont, à ce jour encore, l’objet de multiples formes de discrimination en particulier dans le domaine de l’habitat.

La loi de 1990 sur le droit au logement et celle du 5 juillet 2000 ont certes reconnu le droit au logement pour ces familles et prévu des aires d’accueil à même de répondre aux besoins des seuls voyageurs. Mais après treize années de tergiversations, cette législation demeure largement inappliquée et inadaptée dans la région. Par ailleurs, comme nous le rappelons à chaque occasion, la loi du 5 juillet 2000, si elle était réellement mise en oeuvre ne répondrait que partiellement aux besoins d’habitat des familles concernées. Si la circulaire ministérielle du 17 décembre 2003 a bien proposé la création de terrains familiaux facilitant la sédentarisation, ce texte n’a jamais été appliqué dans la région.

Les différents schémas départementaux prescrits par la loi n’ont pas pris en compte la situation d’un nombre croissant de personnes considérées comme gens du voyage parce que logées dans un habitat mobile ou précaire sinon insalubre. Pour de multiples raisons et d’abord des contraintes économiques, ces familles ont arrêté de voyager régulièrement et se sont sédentarisées parfois depuis de nombreuses années. Dans le département des Bouches-du-Rhône, une enquête menée en 2003 faisait apparaître que plus de 2000 personnes résidaient de manière permanente dans une quarantaine de communes. Les contacts réguliers que nous maintenons avec ces familles dans les autres départements de la région nous conduisent au même constat, en particulier dans le Var et le Vaucluse.

Ces formes d’habitat léger et précaire se développent au fil des ans malgré les obstacles juridiques sensés les réglementer voire les interdire. C’est la politique des maires ou la pression du voisinage qui conduit souvent à stigmatiser ces familles en accroissant ainsi leur marginalité. Il convient toutefois de noter que dans certains cas, ces installations à l’origine précaires se pérennisent offrant un confort relatif à leurs occupants Elles font alors partie du paysage local. De même il convient ici d’éviter une généralisation hâtive. Si une majorité des familles désignées sous le terme ‘gens du voyage’ sont dans une précarité économique manifeste, pour d’autres c’est avant tout la précarité juridique de leur habitat qui les marginalise aux yeux de l’opinion publique. Au cours des quinze dernières années, cette sédentarisation s’est considérablement accrue dans la région conduisant à de multiples conflits de voisinage et à la radicalisation de nombreux maires.

Il convient pour être complet de mentionner le cas des personnes qui, en général dans le sud de la France, sont appelées gitans et qui n’ont qu’exceptionnellement été itinérants. D’origine espagnole pour la plupart, ces familles, tout en maintenant des liens avec leur culture d’origine, se sont adaptées au mode d’habitat commun. On les retrouve fréquemment dans l’habitat ancien dégradé des centres-villes, dans le patrimoine social dévalorisé ou dans des cités dites ‘d’habitat adapté’ qui, sauf exception, renforcent leur marginalité et rendent problématique leur inclusion sociale.

Ces quelques éléments de connaissance de ce public nous conduisent à considérer qu’une part importante de ces familles relève à n’en pas douter des critères définis par le plan national de lutte contre la pauvreté.

3°Une prise en compte indispensable de ces familles dans le diagnostic local.

Pour notre part nous avons, depuis plus de 10 ans, recueilli de nombreux témoignages concernant les familles tsiganes sédentarisées dans la région. Les uns sont propriétaires du terrain qu’ils occupent. D’autres, sans droits réels, sont parfois sédentarisés depuis 40 ans et trois générations. D’autres encore se sont regroupés sur des terrains classés depuis comme inondables. D’autres enfin se voient expulser sur des bases juridiques contestables du terrain qu’ils ont acquis et refuser le branchement aux réseaux d’électricité, à la demande du maire.

Nous aidons régulièrement ces familles à connaître leurs droits et parfois, avec succès, à les faire valoir devant la justice. Nous avons multiplié, notamment devant les commissions départementales des gens du voyage, les rapports et les interventions afin d’alerter les pouvoirs publics
En 2004 nous avons réalisé, avec l’appui de la Fondation Abbé Pierre, une enquête sur les conditions de vie dans les cités à Marseille ; Depuis lors nous avons cherché à compléter et élargir ce travail en intervenant en 2011 dans l’élaboration du Plan Local de l’Habitat. Notre projet n’a pas été retenu. En 2012 nous avons présenté aux élus du Conseil Général des Bouches-du-Rhône une note de synthèse sur les conditions d’habitat des tsiganes sédentarisés.

A ce jour ces contacts n’ont eu aucun d’effet et la précarité de ces familles ne cesse de s’aggraver comme nous l’avons constaté dans le dossier largement diffusé intitulé :les gens du voyage’ interdits dans les Bouches-du-Rhône.

Lors des assises territoriales du 28 juin ainsi que lors de la réunion de la commission départementale des gens du voyage nous avons rappelé publiquement la situation d’exclusion de ces familles et les conséquences sur ‘le bien vivre ensemble’

Nous avons retenu que ces diagnostics seront établis après concertation avec l’ensemble des acteurs concernés. Nous ne prétendons pas disposer d’une vision exhaustive de la situation, mais nous demandons à prendre part à un groupe travail auquel nous associerons les membres de notre association appartenant à la communauté des gens du voyage qu’ils soient voyageurs ou sédentaires.

Marseille 5/12/2013


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