Caroline Godard et Alain Fourest ont pris part aux débats .
On lira ci dessous le résumé d’une intervention
Communication sur l’habitat « des gens du voyage »
Présentée par Alain FOUREST président d’honneur de Rencontres Tsiganes en Provence-Alpes-Côte-d’Azur .
Des désignations imprécises et trompeuses
Entre nomades et sédentaires : Ce n’est pas à nous de faire le choix.
Voyageurs, nomades, semi-sédentaires, sédentaires, ces différents qualificatifs sont en général utilisés par les institutions pour classer en catégories identifiables par leurs lieux d’habitat, les Roms-Tsiganes plus généralement désignés en France sous le terme « gens du voyage ». Ces diverses désignations qui sont le fait de la société d’accueil, sont à l’origine de nombreux malentendus qui contribuent à marginaliser ces personnes en les enfermant dans des catégories figées qui ne correspondent pas toujours à la réalité de leur mode de vie et de leur histoire.
Le sujet de l’habitat est aujourd’hui au coeur de ces incompréhensions qui s’accentuent chaque jour comme nous le constatons partout en France. Si le droit à l’habitat pour les « gens du voyage » a bien été reconnu par une première loi en 1990, la loi du 5 juillet 2000 dite loi BESSON est venue apporter des précisions qui aujourd’hui font l’objet de multiples interprétations et controverses : L’article de la loi précise : « qu’elle concerne des personnes dites gens du voyage et dont l’habitat traditionnel est constitué de résidences mobiles » Une telle formulation suggère que cette loi ne concernerait que des personnes sans résidence fixe qui se déplacent régulièrement à travers le pays .
Dans la pratique, le qualificatif « Gens du Voyage » est couramment appliqué à des personnes qui, vivant ou non en résidence mobile, ne voyagent plus depuis longtemps ou de manière très épisodique. D’autres encore, propriétaires des terrains sur lesquels ils séjournent sont des résidents permanents. En complément de leurs caravanes, ils y stationnent souvent dans des mobil homes qui, au vu de certaines décisions de justice, ne semblent pas relever de la loi du 5 juillet 2000.
Les différents articles de la loi mettent en avant l’analyse des besoins de cette population qui ne se limitent pas au seul droit de stationner une caravane mais impliquent également l’accès à l’éducation, à la santé, aux activités économiques, bref à des conditions d’habitat ouvertes à tout citoyen. Il est très vite apparu que cet aspect de la loi a été largement négligé devant la seule obligation retenue de mettre à disposition des intéressés un terrain d’accueil aménagé. Le choix et la localisation des terrains lorsqu’ils ont été réalisés sont, sauf exception, bien loin de répondre aux conditions fixées par la loi.
Une conception de l’habitat réduit à la caravane, les sédentaires oubliés.
On notera enfin que le titre VII de la loi intitulée : les besoins en habitat des Gens du Voyage précise que : « les modes de vie des sédentaires ou semi-sédentaires nécessitent des modes d’habitat que l’on qualifie généralement d’habitat adapté… ces modes d’habitat ont des fondements culturels, professionnels, familiaux… les solutions envisagées pour répondre aux besoins en habitat des Gens du Voyage pourront figurer en annexe au schéma départemental.
Une législation et des pratiques à reconsidérer.
Voilà plusieurs années déjà que des rapports et des projets de réformes sont proposés par des élus de tout bord politique mais aussi par des organisations et mouvements associatifs représentatifs de la population des Roms-Tsiganes eux- mêmes. Ces projets ont pour mérite de tenter de mettre la législation française en conformité avec les directives européennes qui deviennent de plus en plus pressantes.
Des évolutions doivent être également proposées dans le domaine de l’habitat. La loi du 5 juillet 2000 nécessite une refondation pour prendre en compte les insuffisances constatées et l’évolution des besoins des familles. Il convient de reconsidérer certaines règles d’urbanisme mais aussi le rôle de maires qui interdisent toutes formes d’habitat léger. Entre le logement traditionnel et la caravane mobile doivent pouvoir trouver place des formes d’habitat librement choisi, à caractère plus léger sur des périodes plus limitées. La seule alternative entre le droit commun représenté par un logement collectif en zone urbaine et le nomadisme permanent ne peut être une réponse satisfaisante.
Pour conclure provisoirement
La reconnaissance de la caravane ou toute forme d’habitat mobile comme un logement est une nécessité. Nous considérons en effet que la reconnaissance concrète du droit à l’habitat des « gens du voyage » passe par une adaptation des règles d’urbanisme. Une telle évolution permettra aux maires d’autoriser un mode d’habitat léger et éphémère répondant aux besoins d’un nombre croissant de citoyens, qu’ils appartiennent ou non, à la communauté des gens du voyage. Dans l’attente des modifications envisagées par le gouvernement de loi de 1969 et de 2000 sur l’accueil des gens du voyage, le projet de loi sur le logement et l’urbanisme doit tenir compte des besoins tels que nous les exprimons.
Alain FOUREST
Marseille le 10/05/2013